Hypero Tomo
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Slow Food Last but not least
« Papa, viens voir »
Ma fille de 6 ans alors venait de me tirer de mon sommeil. Il faisait chaud et lourd ce jour d’été, un temps à faire la sieste si les mouches veulent bien vous laisser tranquille. Il avait beaucoup plu, des orages, mais le beau temps était revenu depuis quelques jours.
Je sortais péniblement de mon sommeil, en râlant. Il ne fait jamais bon réveiller un ours qui dort, et si ma fille l’avait fait c’est qu’il devait avoir une bonne raison. Grognon, je m’habillais pour la rejoindre. Elle me tendit un panier, celui qui sert à récolter les champignons. Je me chaussais de mes bottes et nous voilà partis dans les bois.
« Tu sais je les ai jamais vu ceux là mais ils sont beaux, tu m’en veux pas de t’avoir réveillé »
J’étais toujours dans un demi sommeil, et je ne savais que lui répondre. Les enfants trouvent toujours des trésors, pommes de pin, bâtons, cailloux et autres plumes. Pas de quoi réveiller un ogre tout de même.
« Mais non, ma chérie, de toute façon je n’avais pas sommeil »
Après tout j’étais réveillé et son enthousiasme eut rapidement raison de ma mauvaise humeur. Elle me guidait d’un pas décidé sur le chemin de Lapergue, au sortir du village. Nous prenions souvent ce parcours pour aller chercher les champignons, et elle m’avait tendu le panier qui va avec. Un trésor ? Qu’est ce qu’elle en savait du haut de ses six ans ?
On descendit le pré de Carray, le long de la forêt, en contrebas du chemin de la mine. Elle marchait d’un pas décidé, ignorant quelques russules anonymes aux coloris délavés.
« C’est pour ça que tu m’as réveillé ? »
Mes reproches n’arrivaient pas à avoir raison de sa détermination, elle me tira du bras vers le fond du pré. Elle tendit son petit doigt vers sa découverte.
Une rangée entière de champignons ! Tous alignés, le long du bois à trois mètres de la forêt. Bien dressés comme des petits soldats, se tenant fiers.
« C’est quoi Papa ? »
Elle venait de me tirer de mon lit pour une découverte formidable. Des amanites des Césars, ou oronges, un champignon rare et très recherché à la saveur fine et parfumée. On en trouve des cèpes, des kilos, on tombe souvent sur des tapis de trompettes de la mort, on croule parfois sous des cageots de girolles ou de coulemelles, mais des oronges ! C’est rare, pas tous les ans, parfois dix saisons sans en trouver. J’avais consulté des bouquins qui en parlaient, des vieux qui racontaient leurs récoltes issues de leurs souvenirs approximatifs, j’en avais déjà vu deux ou trois fois au marché à des prix prohibitifs, amis je n’en avais jamais trouvé. Et c’est une petite fille de six ans qui m’y amenait en me pointant son petit doigt comme pour s’excuser.
« Ils sont bons ceux là ? »
Amanites des Césars à la crème
Allez cueillir un chapeau, un panier ou tout ce que récipient peut contenir d'oronges à peines ouvertes.
Nettoyez les, coupez les en morceaux
Faites les revenir dans un peu de beurre, jusqu'à ce que l'eau physiologique soit évaporée
Versez un peu de crème fleurette et laissez napper à feux doux
Salez, poivrez, ne rajoutez ni ail, ni persil, les oronges sont subtiles et délicates.
Servez chaud sans rien d'autre.
Les oronges jeunes se mangent crues en salade ou nature. Arôme plus puissant et frais.
Voilà, dernier Slow Food, merci de m'avoir lu
Peyo
Candide Voltaire